Vlad et moi on a décidé qu’en Écosse on allait couchsurfer. Le couchsurfing, pour les niais, c’est un système d’échange de canapé : je m’inscris sur le site et je propose mon clic-clac Ikea à quiconque cherche un logement à Bordeaux ; je peux contacter quelqu’un qui propose son clic-clac Ikea à Edimbourg.

Le site qui a lancé ce système, c’est CouchSurfing.org, un site baba-cool fondé par des types qui veulent rendre le monde meilleur. Non, non, je plaisante pas, ils sont sérieux : « As a community we strive to do our individual and collective parts to make the world a better place, and we believe that the surfing of couches is a means to accomplish this goal. » (En gros, ça veut dire qu’ils veulent faire du monde un endroit meilleur et qu’ils croient que le surf de canapé est un moyen pour atteindre ce but.) Je vous en remets un bout, c’est inénarrable : « We open our minds and welcome the knowledge that cultural exchange makes available. We create deep and meaningful connections that cross oceans, continents and cultures. » (Nous ouvrons nos esprits et accueillons le savoir que l’échange culturel rend possible. Nous créons des connections profondes et pleines de sens qui franchissent les océans, les continents et les cultures.) Le principe, c’est pas seulement le canapé, c’est surtout d’ouvrir son coeur pour être plus tolérant et accueillir la différence de l’autre parce que tous les humains sont égaux, tu vois, viens mon frère on va fumer un pétard en chantant du Dylan autour d’un feu.

Moi j’adore complètement. J’ai rarement l’occasion de rencontrer des gens comme ça et j’avais oublié que ça pouvait exister. En cherchant des canapés à Edimbourg j’ai trouvé une fille qui vit dans une communauté — « vous pouvez venir même si je ne suis pas là, ils ont l’habitude, par contre on vit dans des maisons dans les arbres ». Là je crois que je suis pas encore prête, surtout qu’il y a sur le site des commentaires de gens qui s’y sont rendus et qui se sont barrés à cause des rats ; en revanche j’ai aussi trouvé un certain Paul Winter qui est avocat et qui a l’air très gentil, pas trop hippie et qui est prêt à nous faire visiter le coin. Je lui ai écrit, mais le problème c’est qu’il faut aussi qu’on lui plaise, alors j’ai rédigé en anglais un profil se voulant ressemblant mais un peu marrant et attractif en même temps, ce qui n’est pas évident parce qu’en vrai Vlad et moi on est pas très très sympa.

Ça me plaît comme idée parce que tout le monde a l’air super enthousiaste et peace and love, et même si je suis sûre que dans la vraie vie la moitié sont des cons comme partout, j’ai l’impression que lorsqu’on y sera, les gens qu’on va rencontrer seront tous sympa et ouverts parce que ça aura été fait dans le cadre d’un projet qui nous sort du quotidien. Je veux dire, moi-même je ne suis pas exactement la fille qui aime tout le monde, et pourtant quand je me balade sur ce site j’ai envie de tous leur faire des bisous. Je me sens même prête à laisser quelqu’un dormir sur mon canapé, alors qu’hier encore, si on me l’avait demandé, j’aurais dit : « pas de puces sur mon Ikea beige ».


CouchSurfing
, le site qui rend aimable.