Aujourd’hui j’ai trouvé, sur le sol de la cuisine d’une vieille bicoque puant la clope, une souris agonisant dans une tapette ; le vieux monsieur attendait qu’elle crève et l’aura sans doute mise dans la poubelle ensuite, et demain je vais encore trouver la poubelle pleine de mouches. La télé hurlait Carole Rousseau et de la musique militaire, le monsieur fumait des Gauloises et refusait d’aérer ; ensuite je suis partie chez un autre monsieur, jeune celui-là, qui est vraisemblablement schizophrène et qui a de temps en temps des sortes de blocages, il freeze comme mon ordinateur. Il me regarde fixement jusqu’à ce que je dise quelque chose et il se tient beaucoup trop près et il me demande sans cesse la permission pour tout. Après je suis partie donner à manger à une vieille dame qui a la maladie d’Alzheimer ; son fils insiste pour qu’elle finisse son assiette que je lui donne à la cuillère et il parle d’elle en sa présence, me racontant à quel point c’est triste parce qu’avant elle était mieux et que maintenant les rôles sont inversés car lorsqu’il était petit c’est elle qui le forçait à manger. Puis après c’était une autre dame qui parlait tout le temps, elle m’a paru très jeune bien qu’elle soit très vieille ; elle parlait pendant que je m’affairais et maintenant je connais sa famille de A à Z, et à la fin elle ne me laissait pas partir, j’ai pris en douce une photo du papier peint de sa salle de bain. Après je suis retournée gaver la dame qui a Alzheimer alors qu’elle avait vomi à midi ; demain, lorsqu’elle en aura assez, au lieu d’attendre qu’elle ait oublié qu’elle en avait assez pour lui enfourner une nouvelle cuillerée dans la bouche, je donnerai discrétos le reste au clébard dégueulasse qui s’obstine à me lécher les pieds. Comme ça tout le monde sera content.