Elle me dit : « Bon, j’ai parlé de moi, mais t’as rien raconté sur toi ! »

Je me tortille sur mon siège. Angoisse. Damned, je suis découverte.

Ah mais Madame, c’est que j’ai rien à raconter, moi. J’ai pas d’histoire, ni d’histoires, je sais rien, juste que je ne sais rien ; j’écoute les autres et je prends leurs paroles, je ne sais même pas les restituer, juste les garder en moi. Je ne suis pas une conteuse, pas un témoin, pas une polémiste, pas une écorchée, je ne respire ni la joie de vivre ni le désespoir. J’ai les oreilles ouvertes mais ma bouche est close, je vous regarde dans les yeux jusqu’au moment où je deviens le sujet de conversation, et alors mes yeux s’échappent, je balbutie trois mots pour passer à autre chose tout en regardant à côté de votre visage, je vous supplie de saisir une perche, n’importe laquelle, et de vous remettre à parler. De vous. Pas de moi.

S’il vous plaît.