J’aime pas Bordeaux.

Rue de la Rousselle


Cette ville est magnifique. Vraiment. Dès le premier abord, elle en impose, avec ses façades sur la Garonne, qui sont majestueuses, somptueuses, sans aucune rupture. Puis on entre dans le coeur de la ville en empruntant une de ses portes, ou en passant par l’entrée des artistes, et on peut alors soit parcourir les axes grandioses et goûter la splendeur de la ville, soit se perdre dans un dédale de rues, qui renferment une atmosphère particulière, différente selon le quartier. C’est cette seconde option que je préfère.

Place de Bir Hakeim


Parfois, on ne sait plus qu’on est dans Bordeaux. On s’est tellement enfoncé dans les entrailles de la ville, dans des venelles que personne n’emprunte, qu’on se demande comment on va retrouver le chemin du retour.

Rue du Muguet


Et là, alors qu’on se croyait seul au monde, on débarque sur une place animée, avec des terrasses pleines, où la rumeur des conversations se mêle aux notes des musiciens roms.

C’est ça que j’adore à Bordeaux. Et pourtant, j’aime pas Bordeaux.

Pont Chaban-Delmas


Ou plutôt, Bordeaux ne m’aime pas. Elle ne veut pas m’accueillir. Elle ne veut pas que je me sente chez moi.

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Quand je parcours ses rues, que je traverse ses places, elle me tente, mais jamais la promesse ne se concrétise. J’ai envie de vivre dans cette atmosphère, cette ambiance que je ressens. J’ai envie de participer à ces conversations en terrasse. Mais j’ai renoncé à croire que ce sera le cas un jour. Comme dans un jeu cruel, la ville me montre ce que je pourrais vivre en elle pour mieux me le refuser. Se refuser.

Piles du pont Chaban-Delmas


Je l’ai compris l’autre jour. J’arrivais de la rue Teulère, où j’avais goûté la quiétude du quartier, la paix qui s’en dégage ; j’ai débouché rue Saint-James et là, tout à coup, l’animation, les magasins, les gens en terrasse, joyeux. Ça sentait les promesses de printemps, les flâneries le nez au vent, quand on va retrouver ses amis pour boire un verre, et qu’on croise quelqu’un qu’on connaît avec qui on s’arrête cinq minutes pour discuter ; la vie de quartier, qu’on n’a même pas conscience de vivre quand on appartient à quelque part. Je me suis surprise à avoir hâte que le printemps s’installe vraiment, pour pouvoir enfin aller à des concerts en plein air, boire des bières au soleil, préparer des apéros ou simplement se balader en ayant une conversation intime avec quelqu’un.

En bas de la rue, place Fernand-Lafargue, j’ai traversé les éclats de voix, la fumée de clope, les amitiés qui se tissent autour d’un verre pris après une journée de travail, les rires, la musique.


Traversé.

Feu d'artifice pour l'inauguration du pont