J’ai quelques années seulement et j’accompagne ma mère à la quincaillerie pour y chercher je ne sais quelle vis ou quel foret pour la perceuse. Le vendeur manifeste son étonnement de voir une femme s’intéresser à ces choses, et demande à ma mère pourquoi ce n’est pas son mari qui s’occupe de ces affaires éminemment viriles ; ce à quoi elle répond en riant : « Mon mari ? Il ne saurait pas planter un clou ! » Et alors le vendeur, s’esclaffant à son tour, a cette réplique formidable :

— Faut vous prendre un Jules !


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J’ai un peu plus d’années et je suis au magasin de bricolage. Vlad surveille les vélos dehors et je tiens à la main un article de plomberie, ennuyée. Le bitoniau dont j’ai besoin se trouve dans le paquet, mais il fait partie d’un kit qui coûte cher et dont je n’ai pas besoin. Je jette autour de moi des regards censés être propres à attirer un vendeur empressé, et c’est un client qui finit par s’approcher ; il s’enquiert de ma question et nous discutons un moment de mon problème. Comme j’ai à peu près l’air de savoir ce que je cherche, il s’étonne : « Vous êtes bricoleuse, vous ! » (Il n’ajoute pas : « pour une femme », mais c’est inclus dans le sous-texte). Vaguement flattée tout en ayant conscience que ça devrait être l’inverse, je réponds que j’ai juste regardé ce qui était cassé et que je n’ai pas eu trop de mal à comprendre comment ça fonctionnait, le mécanisme en question étant tout ce qu’il y a de plus trivial.




J’ai un peu plus d’années et deux jours et, juchée sur mon fidèle Baudet, je roule à travers Bordeaux à la recherche — encore — du fameux bitoniau. J’arrive à la quincaillerie nichée dans une impasse, dont personne ne connaît l’existence, pas même le client d’avant-hier. Ma simple présence dans cet établissement poussiéreux et encombré d’étagères qui montent jusqu’au plafond, chargées de trucs et de machins, montre a priori que je sais planter un clou (pas beaucoup plus, cela dit, mais vous n’êtes pas censés le savoir). Je formule au monsieur en bleu de travail ma demande d’un bitoniau, et il me répond qu’on n’en trouve pas au détail, mais que si j’ai un ami qui bricole, il pourrait m’arranger ça avec un bout de fil de fer… Je sous-entends subtilement que je compte bien le faire moi-même, ce que comprenant, il se sent obligé d’entrer dans des explications sur la marche à suivre, car les talons que je porte m’empêchent probablement de comprendre comment on entortille un fil de fer autour d’une tige.

En tirant sur sa Vapote, il ajoute :

— Donc si vous avez un ami qui a du fil de fer…